Mais où donc est passé Dieu ?

Depuis que Dieu est mort – selon la formule célèbre du philosophe allemand Friedrich Nietzsche – on n’a jamais autant parlé de lui. Ce qui a surtout changé depuis l’avènement de l’individu autonome, libre et responsable, c’est qu’il est passé du statut de l’évidence et de l’incontestabilité véhiculé par les religions instituées à une possible mise en question. Dieu existe-t-il ? s’interroge l’homme moderne. Une réponse négative à cette question qui touche à l’essence même de l’homme a conduit aux philosophies de l’absurde (Sartre, Camus), avec leur cortège d’angoisses et de dépressions. Mais aussi à la notion de surhomme de Nietzsche, qui invitait l’homme à prendre la place de Dieu. La voie de l’immanence de Dieu était ouverte.

Pour un nombre croissant de nos contemporains, Dieu a quitté son trône là-haut dans le ciel pour descendre ici-bas dans le cœur de l’homme. On peut voir un signe de cette mutation à travers les publications d’une revue comme le Monde des Religions, créé à l’origine pour analyser les religions instituées comme partie prenante voire fondement de la culture, et qui se fait de plus en plus le relais des sagesses du monde. Pour autant, les religions instituées ou parallèles n’ont pas dit leur dernier mot, bien que les spécialistes soient partagés à propos de leur vitalité réelle. Si pour certains le soi-disant retour du religieux n’est que « la manifestation d’un arbre déraciné qui bourgeonne encore pendant quelques saisons », pour d’autres, les religions, loin d’être entrées dans un processus d’extinction, se métamorphosent lentement pour répondre aux besoins d’une authentique expérimentation intérieure du sacré.

Si nous ressentons de plus en plus le besoin d’être reliés à notre être profond (Dieu immanent), nous avons aussi besoin d’être reliés aux autres et au monde, voire au Tout (Dieu transcendant). Le défi du 21e siècle serait-il d’apprendre à être ensemble tout en étant séparés, comme le pensent certains pratiquants de la méditation ? Peut-être. Mais cela ne doit pas exclure des moments de rencontre pour échanger, partager, pratiquer ensemble. La confrontation avec les autres reste un puissant stimulant dans une dynamique spirituelle, de même qu’elle protège du piège de la satisfaction de soi : ce sont toujours les autres qui nous font apparaître nos manques, nos imperfections, c’est-à-dire les points sur lesquels il nous faut travailler pour parfaire l’union. Quelles que soient les formes que prendront les religions du futur, et plus encore si elles s’accompagneront d’un travail sur soi, des lieux de rassemblement dédiés garderont toujours leur raison d’être.

Publié le : 23/03/2016

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