Le Mandala du Tarot : sa structure mathématique

Alain Meynard nous présente ici son cheminement à travers le symbolisme du Tarot tout en nous en communiquant le fruit, qu’il a également développé dans ses cours de Tarot et qui fera peut-être l’objet d’un livre à venir.

De la « mélancolie » de Dürer au mandala Tarot

Albrecht Dürer – Mélancholia 1514

Les images du Tarot, de par leur fonction même de relieurs entre conscience et supra-conscience, peuvent induire un état d’hyperlucidité difficilement soutenable dans le quotidien car l’énergie considérable qui l’accompagne s’empare de tout l’espace disponible et peut conduire à une sorte de possession. Or le but du Tarot n’est pas de nous dominer mais de nous rendre libres en nous rendant maîtres.

Conscient du danger de cette submersion, la voie de la maîtrise nous est apparue devant la contemplation de la célèbre Mélancolie de Dürer. Un compas, une équerre, un « carré magique » en toile de fond …et ce fût l’illumination ! Cet instant sublime, comme toute illumination, est proprement indicible, mais elle restera la source d’une inspiration intarissable, l’eau vive de l’Etoile se déversant sans fin dans le bassin de notre Lune, amenant dans ses flots l’architecture du Tarot.

Qu’est-ce qu’un mandala ?

Mandala est un terme sanskrit pour désigner le cercle. Dans les traditions bouddhistes, il s’inscrit dans une forme carrée, combinant à la fois le sens symbolique du cercle et du carré, du ciel et de la terre, de la perfection originelle et de sa manifestation, ainsi que leur interaction réciproque générant la dynamique de l’évolution.

Les mandalas sont le plus souvent utilisés comme support de méditation, dans le but de relier la conscience séparée à sa Source. C’est aussi cette fonction que lui reconnaît le psychologue C.G.Jung, qui voit dans le mandala un symbole de la psyché incluant le conscient et l’inconscient. Pour Jung les formes rondes du mandala représentent l’intégrité (l’unité) naturelle, tandis que les formes quadrangulaires évoquent la prise de conscience de cette intégrité.

Construisons le mandala du Tarot

« Redevenez comme des petits enfants », disait un certain sage en faisant allusion à la simplicité de l’âme accessible en chacun. Ami, c’est à cette simplicité que nous te convions, tandis que se déploie sous tes yeux le jeu de piste du Tarot…

Au début était UN, le Ciel, et DEUX, la Terre, que nous représentons par :

Base commune de la génération des figures de géomancie et du Yi-King.

De leur combinaison naissent les 4 éléments, fondement du monde manifesté :

Genèse des 4 éléments à partir du 1 et du 2.

En recombinant ces 4 éléments les uns avec les autres, nous obtenons 16 figures de base :

Tableau de génération des 16 figures de géomancie.

qui sont les 16 figures de la Géomancie, auxquelles, nous le verrons, correspondent les 16 Honneurs du Tarot.

Projetons ce limpide processus créateur au cœur du mandala Tarot. Comment s’ordonnancent, selon une cohésion interne évidente, les arcanes majeurs ? En « carré magique de 4 », nous souffle dans un clin d’œil Albrecht Dürer* !

*Dans la gravure, au-dessus de l’ange et sous la cloche, figure un « carré magique de 4 », tel que détaillé ci-dessous :

Le Carré magique de 4.

Que l’on additionne les nombres contenus dans les axes horizontaux, verticaux ou en diagonales, le résultat est toujours 34 (ex : 16+10+7+1 = 34 / 21+11+7+14 = 34)

34, épousailles de l’Impératrice et de l’Empereur, du triangle et du carré, de l’esprit et de la matière en nous.

Avec l’ordonnancement des 16 premiers arcanes, tel le pèlerin en partance sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle, nous sommes en possession de la coquille …reste à trouver l’Etoile !

Or qu’observe-t-on en additionnant deux par deux les nombres figurant dans les deux diagonales ? Le résultat est toujours 17. (1er axe : 16+1=17 ; 10+7=17 2ème axe : 13+4=17 ; 11+6=17)

Il ne restait qu’à écarter le carré magique pour laisser prendre à l’Etoile sa place assignée : au cœur du mandala, au centre de la Croix de la manifestation, croisement de la verticalité de l’esprit et de l’horizontalité de l’expérience dans le monde.

Le cœur du mandala : les arcanes majeurs.

Les 4 arcanes suivants s’inscrivent dans le mandala selon une clé qui se révèle tout au long du Tarot : le rapport du 4 par 3 et 1.

Exemples :

  • 3 séries des mineurs sont nombrées (Bâton, Epée, Coupe), la série des Deniers ne l’est pas.
  • dans les figures des Honneurs, 3 Valets portent chapeau, un est tête nue. Etc…

Appliquons cette clé à nos sous-carrés, en écartant à chaque fois le nombre le plus élevé :

Ainsi en A, retirons le 14 ; la somme des 3 cartes restantes (1+12+7) est 20, le Jugement.
En B nous retirons le 13 ; la somme des 3 cartes restantes (8+2+11) est 21, Le Monde.
En C nous retirons le 16 ; la somme des 3 cartes restantes (10+3+5) est 18, la Lune.
En D nous retirons le 15 ; la somme des 3 cartes restantes (6+9+4) est 19, le Soleil.

Reste le Mat, arcane sans nom, qui n’a aucun point d’ancrage car il représente l’homme en marche vers sa destinée qui chemine dans le labyrinthe du mandala au gré de sa pérégrination.

Le carré central du mandala a généré les arcanes majeurs du Tarot. Nous allons voir comment les arcanes mineurs s’articulent dans 4 triangles, formant ainsi la pyramide initiatique dans laquelle se déroule l’aventure de la psyché.

La série des Deniers reflète bien le mode pythagoricien de décompter les nombres. La Tétraktys de Pythagore est construite sur le principe suivant :

La Tétraktys de Pythagore.

Lorsque nous incorporons ce triangle au carré central, en respectant l’écartement occupé par l’Etoile, le Soleil, la Lune, le Monde et le Jugement, 4 espaces se libèrent dans le triangle qui accueillera les Honneurs de chaque série.

La Tétraktys de Pythagore : version Tarot.

Ce triangle contient une énigme métaphysique que nous proposons à votre méditation :

  • le 1 de la Tétraktys est toujours 1, analogique au Bateleur
  • le 2 (deuxième rangée) contient déjà le 2 et le 3 ; le total est 5, le Pape
  • le 3 (troisième rangée) contient le 4, le 5 et le 6 ; le total est 15, le Diable
  • le 4 (quatrième rangée) contient le 7, le 8, le 9 et le 10 ; total 34

Un rapprochement peut être effectué entre les 4 étages de la Tétraktys et les différents niveaux que traverse l’âme (selon la tradition ésotérique) pour arriver à l’incarnation physique :

  • 1ere rangée : niveau de l’âme
  • 2ème rangée : niveau mental
  • 3ème rangée : niveau émotionnel-sensible
  • 4ème rangée : niveau physique

Le Tarot n’a pas fini de nous dévoiler tous ses secrets, il restera, certainement pour longtemps encore, une source inépuisable de méditation…

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