Faut-il ralentir ou accélérer ?

Plus personne ne peut l’ignorer, nous vivons des mutations considérables –semblables en puissance à celle de la révolution néolithique d’il y a dix mille ans, selon le philosophe Michel Serres – qui ébranlent comme jamais dans l’histoire connue nos repères. Toutes les idéologies et valeurs qui ont structuré nos sociétés sont remises en question sur fond d’inquiétudes multiples, laissant à la fois un grand vide de sens et une angoisse diffuse.

Une majorité privilégiée, ou du moins désirante, se raccroche aux branches de l’offre pléthorique des marchés, principal « opium du peuple » des temps actuels. Le travailler plus pour gagner plus et consommer toujours davantage, généreusement distillé par les politiques, accélère nos rythmes de vie jusqu’à nous rapprocher du point de rupture (dépressions et suicides croissants). Face à cette frénésie infernale se développe un contre-courant médiatisé sous le nom de slow life, qui regroupe divers mouvements comme les décroissants, les « Aussteiger » (mot allemand intraduisible qui désigne ceux qui sortent carrément du système pour vivre un mode de vie alternatif), ceux qui appellent à se déconnecter le plus possible afin de se reconnecter à soi par le biais de la méditation ou autres yogas, etc. Mais qui peut vraiment se permettre de sauter du train en marche ?

A problèmes complexes et globaux, il faut des solutions de même nature. C’est ce que proposent deux théoriciens politiques, Alex Williams et Nick Srnicek, dans un « manifeste accélérationniste » traduit en français dans la revue Multitudes 56, qui suscite de nombreux débats. Ils partent du constat que l’organisation actuelle de nos sociétés ne permet pas l’expression de la maturité psychologique de nos contemporains, autonomes et capables de créativité. Loin d’une quelconque nostalgie romantique, ils s’appuient sur deux fondements de nos sociétés – l’essor des nouvelles technologies et le libéralisme – pour s’en servir de tremplin vers le futur. Leurs objectifs : attaquer la domination culturelle de l’éthique du travail, développer les technologies d’automatisation afin de réduire le temps consacré au travail et mettre en place un revenu de base universel pour dégager un maximum de temps libre. Une utopie ? Peut-être, mais une utopie en marche !

Publié le : 05/11/2014

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